Dans une chronologie devenue classique, proposée initialement par Théodore Monod puis reprise et développée ensuite par Henri Lhote, on considère des périodes archaïques, bubaline et tête ronde, contemporaines de chasseurs traquant la grande faune sauvage notamment le grand buffle (datation située dans le grand humide antérieure à 7500 BP), suivies d' une période pastorale (ou bovidienne) où règnent les bovidés (entre 6500 BPet 4500 BP) puis surviennent deux périodes appartenant à la proto-histoire: la période caballine qui voit l' introduction du cheval et les fameux Garamantes (entre 3500 et 2000 BP) et enfin la période caméline lorsque le dromadaire fait son apparition. Ces animaux donnent des repères écoclimatiques et socioculturels.
Depuis les années 1980 des chercheurs, tels A. Muzzolini ou J.L. Le Quellec proposent une chronologie plus courte dans laquelle les périodes bubaline et pastorale ne sont en fait que des visions d' un vaste ensemble regroupant des styles différents. Ils proposent d'aileurs d'abandonner l'appellation "bubalin" attribué à des gravures incluant des représentations de buffles antiques car le terme est source de multiples confusions et proposent de regrouper toutes ces gravures sous le terme "naturaliste", la classification détaillée restant à faire. Ils s'appuient sur un argument de poids : la présence de boeufs domestiques dans tous ces styles, avec pour conséquence un rajeunissement de l' art rupestre dont le début est estimé après l' aride mi-Holocène (7500 - 6500 BP).
Cette chronologie a le mérite de s' élever contre le préjugé d' un évolutionnisme culturel linéaire qui voit se succéder le stade des chasseurs, celui des éleveurs et enfin des agriculteurs et où le chasseur est toujours considéré comme un primitif et un sauvage associé à une mentalité archaïque. Au contraire pour l' ethnologue Marshall Sahlins, le paléolithique était l' âge d' abondance, nos ancêtres chasseurs ne consacraient que quelques heures à la chasse, ils acquéraient facilement de la nourriture puisqu' ils n' étaient pas nombreux. C' est le mythe du paradis terrestre qui est resté dans toute les religions.Les choses ne sont pas aussi simples et les séparations entre les périodes pas aussi évidentes. Les chasseurs-cueilleurs ont cohabité avec les pasteurs pendant très longtemps. Dans l' Afrique subsaharienne l' idée de succession doit être remplacée par celle de coexistence.
Il y a 50 ans à peine, les Bushmen du Kalahari et les Pygmées de la grande forêt équatoriale vivaient exclusivement de chasse et de cueillette à peu prés de la même façon que nos très lointains ancêtres du Paléolithique. Dans le même temps et à une distance de quelques kilomètres des villages d' agriculteurs-éleveurs vivaient en autosubsistance comme ceux du Néolithique. Ces communautés paléolithiques et néolithiques n' ont pas disparu avec l' urbanisation massive et désordonnée du dernier quart de siècle. Conservatisme et adaptation à des normes nouvelles, ces deux formes d' esprits antagonistes chez les Occidentaux sont étroitement liées en Afrique noire non seulement dans le cadre d' un groupe social donné, mais encore - et surtout - dans la tête des urbanisés ayant accédé à un mode de vie moderne. (Marianne Cornevin).
Certains auteurs privilégient les ressemblances stylistiques et thématiques et proposent une approche pan-saharienne en s' appuyant sur le fait que les artistes appartenaient à des sociétés nomades très mobiles. Alfred Muzzolini préconise une approche plus régionale et définit des écoles stylistiques caractérisées par des traits discriminants qui s' inscrivent dans une même séquence spacio-temporelle. Par exemple pour la région du Tassili N'Ajjer et la période pastorale l' école de "Iheren-Tahilahi" est caractérisée par les critères : peintures au trait et personnages de type européen.
La même démarche peut être réalisée pour les monuments à antennes en "V" et les peintures de style caballin , ainsi que pour les monuments à corbeilles et les gravures de style du Messak.
Par ailleurs la présence des boeufs domestiques, qui constituent le principal sujet des peintres, n'est pas attestée dans le Sahara central avant le cinquième millénaire avant notre ère. Les données archéologiques récentes récusent l'hypothèse d'une domestication africaine des bovins et suggère que les premières vaches domestiques auraient été introduites dans l'est de l'Afrique arrivées du Levant.
Tous les auteurs s'accordent sur le fait que les peintures du style "têtes rondes" seraient antérieurses aux oeuvres bovidiennes notamment à cause de nombreuses superpositions, mais ce n'est pas vraiment une certitude et certaines pourraient être contemporaines .
Dans l'état actuel des connaissances on peut admettre que l' art rupestre saharien a débuté après l' aride mi-holocène, lorsque le Sahara connaissait sa dernière grande période humide. Les écoles les plus anciennes seraient l' oeuvre de différents groupes culturels, chacun avec son style propre, mais qui avaient élaboré une haute civilisation pastorale. Il s' est ensuite généralisé et uniformisé sur tout le Sahara avec les périodes caballine et caméline et l'apparition des premiers berbères.